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Cette tendance mode qui fait l’éloge de la minceur est de retour

Vous connaissez la tendance héroïne chic ? Apparue dans les années 90, cette mode fait l’éloge des corps féminins (très) minces. Mais puisque « le corps n’est pas un accessoire mode », son retour devrait nous inquiéter.

Genevieve Abran

Au centre du retour de l’héroïne chic : la famille Kardashian.

En mai dernier, Kim Kardashian s’est vantée, sur le tapis rouge du prestigieux Met Gala, d’avoir perdu 16 livres en trois semaines pour pouvoir porter une robe de Marilyn Monroe. « Je n’ai pas mangé de glucides ni de sucre depuis environ trois semaines », avait-elle déclaré.

Depuis, le physique plus affiné de celle dont les courbes ont autrefois fait sa renommée continue de faire jaser. La transformation de la star a même convaincu le New York Post de déclarer que les courbes étaient out.

Pour le tabloïd, cela ne fait plus aucun doute : l’heure est au look héroïne chic, dont l’esthétique − et le nom − est également associé à la prise de drogue.

LE CORPS DES FEMMES, UNE MODE ?

La publication du New York Post a suscité la consternation. La docteure en psychologie Marilou Ouellet ne passe pas par quatre chemins : il y a un danger à réduire de la sorte le corps des femmes à une tendance.

« Le corps n’est pas un accessoire mode. C’est comme si on traitait le corps d’un être humain comme si c’était un accessoire qu’on pouvait changer au gré de nos envies », dénonce-t-elle.

La créatrice de contenu Caroline Huard, alias Loounie, s’insurge elle aussi devant le retour en force de l’éloge de la maigreur.

« Le problème, c’est de dire que certains types de corps sont à la mode », déplore celle qui anime le balado À plat ventre ,sur la culture des diètes.

« Quand il est question de mettre une silhouette à la mode, on nous vend l’idée qu’on a le contrôle de notre silhouette au même titre qu’on a le contrôle sur notre couleur de cheveux ou les vêtements qu’on porte ou sur le type de maquillage à la mode », ajoute la militante antigrossophobie.

DES IMPACTS SUR LA SANTÉ

Des tendances comme celle de l’héroïne chic peuvent avoir des impacts réels sur la santé mentale et physique de certaines femmes, affirme Marilou Ouellet. Elle rappelle d’ailleurs que la plupart des gens sont insatisfaits de leur corps.

« Si l’idée d’avoir un corps filiforme prend tout l’espace dans notre tête au quotidien, il ne reste plus beaucoup de place pour investir dans les choses qu’on aime et qui sont réellement importantes pour nous », regrette-t-elle.

« Quand on sait ce que ça prend pour arriver à être mince, à moins d’être l’une des rares personnes qui [sont] naturellement minces, c’est sûr que c’est très inquiétant qu’on clame haut et fort qu’être très mince soit à la mode », s’inquiète pour sa part Caroline Huard.

QUEL MESSAGE AUX ADOS ?

Les adolescentes sont particulièrement vulnérables face à une telle glorification de la minceur, souligne Marilou Ouellet. L’obsession du corps parfait peut les pousser à développer des troubles alimentaires ou à adopter des diètes qui peuvent être dangereuses.

« C’est une population vulnérable parce que c’est une période où on cherche à s’identifier à des modèles, où on est en train de développer notre identité, mais aussi où c’est très sensible au niveau de l’image corporelle », explique Marilou Ouellet.

Caroline Huard en sait quelque chose : elle a grandi en étant consciente qu’elle était plus grosse que ses amies.

« J’ai toujours eu l’idée que c’est mal d’être gros, donc que je ne pouvais plus être grosse, et ça m’a fait développer une mauvaise relation avec l’alimentation et le sport », confie la productrice de contenu qui s’est fait connaître pour ses recettes véganes.

Celle qui a notamment grandi avec Britney Spears appelle aujourd’hui à une meilleure représentation de tous les corps dans les médias.

« Il faut célébrer tous les corps, arrêter de mettre de l’avant l’idée que certains corps sont supérieurs à d’autres au niveau de notre réussite, de ce qui est perçu comme beau », conclut-elle.

« C’est comme si on traitait le corps d’un être humain comme si c’était un accessoire qu’on pouvait changer au gré de nos envies. »

– Marilou Ouellet, docteure en psychologie

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