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C’est quoi la justice réparatrice dont parle l’ex de Julien Lacroix ?

Genevieve Abran

Dans une enquête de La Presse et du 98,5 FM sur des femmes qui affirment regretter leur dénonciation publique de l’humoriste Julien Lacroix, son ancienne conjointe Geneviève Morin soutient que la justice réparatrice était « la vraie solution ». Si elle avait su ce que c’était en 2020, elle aurait opté pour cela plutôt que de dénoncer publiquement son ex. Mais c’est quoi, au juste, la justice réparatrice? En quoi ça consiste?

La justice réparatrice, c’est lorsqu’une personne qui a commis une faute « répare » le tort causé, explique Rachel Chagnon, professeure au Département des sciences juridiques de L’UQAM. Cette approche se veut une alternative à la justice pénale régulière.

« C’est l’idée que la réparation va non seulement réparer les victimes dans leur dignité et leur permettre de faire la paix avec ce qui leur est arrivé et passer à autre chose, mais aussi aider la personne qui a commis l’offense, parce que ça va lui permettre de mieux connecter avec les victimes et prendre davantage connaissance de ce qu’elle a fait », poursuit-elle.

Dans certains cas, la justice réparatrice peut remplacer une peine de prison, mais le processus peut se faire aussi après une condamnation, comme dans un cas d’agression sexuelle.

La justice réparatrice est une approche souvent privilégiée au sein des communautés autochtones.

Qui peut avoir recours à la justice réparatrice?

Au Québec, c’est surtout les personnes mineures qui peuvent se tourner vers la justice réparatrice, indique Rachel Chagnon.

La professeure donne l’exemple d’un graffiteur qui pourrait rencontrer le propriétaire de l’immeuble sur lequel il a peint pour prendre conscience de l’impact que son geste a eu.

Une personne qui peut avoir recours à la justice réparatrice entame généralement le processus après la condamnation, parce que les organismes de défense des victimes craignent qu’un accusé n’entre dans un tel programme pour échapper aux risques d’un casier judiciaire, précise-t-elle.

« On veut des gens qui comprennent sincèrement qu’ils ont fait quelque chose de pas correct », mentionne-t-elle.

Peut-on y avoir recours dans des cas de violences à caractère sexuel?

La plupart du temps, dans les cas d’inconduite sexuelle, la justice réparatrice n’est pas une option envisagée, soutient Rachel Chagnon.

« Quand on met l’agresseur et la victime en face, ça se passe rarement bien et souvent même c’est une expérience traumatisante pour la victime », souligne-t-elle, ajoutant que des agresseurs peuvent avoir du mal dans un contexte pareil à reconnaître leurs torts.

Dans les cas de violence conjugale, la justice réparatrice ne convient généralement pas, puisque les bourreaux sont souvent manipulateurs et qu’il peut être difficile de s’assurer de la sincérité de leur démarche de réparation, explique celle qui a été directrice de l’institut de recherches et d’études féministes de 2014 à 2020.

Une victime d’agression sexuelle pourrait toutefois demander à rencontrer une personne ayant été reconnue coupable d’un tel crime – mais qui n’est pas son agresseur – pour entamer un processus de justice réparatrice. Une telle démarche peut aider la victime à donner du sens à ce qui lui est arrivé et l’agresseur à réparer ses erreurs, explique la professeure.

Une victime qui souhaiterait entamer un processus de justice réparatrice peut contacter un organisme qui l’aiguillera dans sa démarche, comme le Centre de services de justice réparatrice ou Équijustice.

Quels sont les avantages?

La justice réparatrice est un bon moyen pour faire plus de place aux victimes dans le système de justice, en leur offrant la possibilité de s’exprimer sur ce qu’elles souhaitent pour se remettre d’un crime, précise Rachel Chagnon.

« Souvent, ce que les victimes veulent le plus, c’est que la personne reconnaisse ses torts et que la personne ne recommence plus. La justice réparatrice, sans offrir de garantie, offre une certaine promesse par rapport à ça », conclut-elle.

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2022-11-24T08:00:00.0000000Z

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