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Chauffer à 16 °C pour sauver la planète et son portefeuille

Coralie Beaumont

Baisser le chauffage à 16 °C, voire 14 °C, ça vous paraît fou? C’est pourtant ce que des participants à une étude belge ont fait sans compromettre leur confort. L’idée, c’est de chauffer son corps plutôt que l’air ambiant, en plus de réduire ses émissions de GES.

Le chauffage des bâtiments compte pour un peu plus de 20 % du bilan climatique de la Belgique, et près des trois-quarts des citoyens de Bruxelles-capitale se chauffent au gaz. Le même scénario s’ étend pratiquement à tout le continent européen : les bâtiments y sont de véritables « passoires thermiques ».

Même si tous les plans d’isolation des bâtiments étaient entièrement mis en oeuvre, cela ne permettrait de réduire que de 50 % leur consommation énergétique, calculent les chercheurs.

Or, pour se mettre sur les rails de la transition environnementale, ils estiment que la consommation devrait être divisée par sept le plus rapidement possible et au plus tard d’ici 2050.

« Des gens sont angoissés à l’idée de recevoir leur facture énergétique », raconte Denis De Grave, un architecte et chercheur belge. Ce dernier fait partie, aux côtés d’un ingénieur-architecte, d’un sociologue et d’un philosophe-physicien, des chercheurs à l’origine du projet.

L’objectif : explorer les façons de baisser la température à laquelle on chauffe les bâtiments sans compromettre le confort, tout en réfléchissant à la transformation des pratiques de chauffage. Leur but est de « limiter l’ampleur de la crise climatique et les impacts des crises énergétiques ».

Pour y arriver, les chercheurs et une vingtaine de participants bénévoles ont testé une perspective innovante : chauffer le corps plutôt que la maison afin de « récupérer le contrôle de son chauffage », explique M. De Grave.

L’expérience s’est déroulée au cours des hivers 2021 à 2023. Bien que les données continuent d’être collectées et qu’elles seront analysées dans les prochains mois, les premiers résultats sont impressionnants. Les participants qui chauffaient leur logement entre 19 °C et 22 °C ont réussi à réduire leur thermostat à 16 °C en moyenne. On parle d’une réduction de 40 % à 50 % de leur consommation de chauffage. L’économie réalisée annuellement se chiffre entre 1000 et 3000 euros, en fonction de la météo d’un hiver à l’autre et du prix du gaz.

EMBÛCHES RENCONTRÉES

Parmi les difficultés auxquelles les volontaires ont fait face, l’un trouvait la sensation de froid en télétravail inconfortable. La solution : utiliser une source de chauffage ponctuelle, comme un sousmain chauffant, un poncho chauffant et même une chaise chauffante.

Sinon, ajouter une couche de vêtement permet également de baisser la température du thermostat jusqu’à trois degrés par rapport à une moyenne de 22 °C, et davantage encore en télétravaillant debout ou en adaptant ses activités par rapport à la météo.

Mais les embûches ne sont pas que techniques. Une autre personne se sentait gênée d’inviter du monde dans sa maison froide, par crainte d’avoir l’air pauvre bien que sa motivation soit écologique plutôt qu’économique.

Les participants ont ainsi échangé sur leurs expériences respectives, ce qui a permis aux chercheurs de collecter de précieuses données sociales. Certains préféraient augmenter temporairement la température quand ils recevaient, tandis que d’autres expliquaient aux invités la pratique du Slowheat et ses bienfaits.

LES BIENFAITS

Qui dit baisse de la consommation énergétique dit bienfaits pour ses finances et, évidemment, la planète. Pour une participante, les importantes économies énergétiques lui ont permis de gagner en qualité de vie générale, comme en consommant davantage de culture et en se nourrissant avec des produits de meilleure qualité. Pour Denis De Grave, le Slowheat permet surtout de reprendre le contrôle sur son chauffage et sa facture énergétique.

Il explique qu’à ce jour, les gens sont dépourvus de moyens et d’informations sur l’énergie, en particulier les locataires d’immeubles qui ne contrôlent pas le système de chauffage de la bâtisse.

Or, pour le chercheur, le chauffage, c’est un peu comme le transport : il est important d’avoir accès à des solutions de rechange selon les différents besoins. Tourner le bouton « plus chaud » ou « plus froid » du thermostat ne permet pas d’avoir accès à une température adaptée aux besoins et aux différentes causes du froid d’une personne.

Dossier

fr-ca

2023-03-23T07:00:00.0000000Z

2023-03-23T07:00:00.0000000Z

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